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· Mon tonton d'A..fric ---Roman---
 

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Date de création : 02.01.2014
Dernière mise à jour : 04.02.2014
28 articles


Mon Tonton d'A...fric ---28---

Publié le 02/02/2014 à 14:14 par montonton Tags : vie moi monde france belle fille nuit voyage pensée afrique pensées air

   A Paris, le gouvernement a créé de nombreux emplois sur l’aéroport Charles De Gaule grâce au coup de pouce d’un certain Bin Laden, héros de l’islam, et d’un Bush, fils à papa, gaffeur et protégé des marchands d’armes. De nombreux militaires y patrouillent par groupes de trois. Chaque portique et chaque machine à rayons X est hanté par d’impressionnantes cohortes d’agents de sécurité. On y trouve des dizaines d’individus par poste, presque davantage que les passagers qui font la file. Il est difficile de croire qu’autant de gens travaillent pour la sécurité aérienne. Voici un métier d’avenir dans un pays ou les universitaires ne trouvent pas d’emploi.

   Les guichets et postes d’embarquement d’El Al sont encore plus surveillés. Des centaines d’agents secrets français en civil et d’autres en uniforme assurent la sûreté des passagers israéliens. C’est à se demander quelle est la cause profonde de toute cette peur ? Les attentats passés ? Mais quelles sont les causes de ces attentats passés ? Une affaire louche entre Moise et Mohamed, entre deux religions issues de la même source ou plutôt une affaire de gros sous ?

 

   Le grand hall du départ de Charles de Gaule est impressionnant.  Il  ressemble à une coque de bateau inversée, tout en métal et verre.

   «On dirait l’ogive d’une Cathédrale futuriste, dit Olivier en s’asseyant sur  un siège en plastique moulé, non loin de la station d’embarquement du vol sur Johannesburg.

 -C’est la coque d’un vaisseau spatial pour la guerre des mondes, lui répond Raphaël.

 -Hé cousin! Lui lance Gonzague, au lieu de raconter des conneries, va me chercher un Coca !

 -Tu me prends pour qui ?

 -Vas me chercher un Coca !

 -Franchement, j’t’assure, ça craint quoi !

 -Tu m’ cherches, junior ?

 -J’te cherche pas ! J’suis pas ton esclave.

 -Alors fait tes prières!

 -T’es lourd Gonzague. J’ai déjà dit « non » et en plus tu ne demandes pas poliment.

 -Oh, monsieur veut d’la politesse ? T’es  une particule de slip et tu veux d’la politesse. T’es exigeant, junior.

 -C’est l’minimum»

 

Gonzague se met à genoux devant Raphaël et, avec un mépris absolu, se  met à geindre.

   «Ô mon cher couuuuuusin, auriez vous l’amabilitéééééé d’aller me chercher un Cocaaaaaa ?

    -C’est mieux, dit Raphaël en se levant.

    -Et une paille s’il vous plait, votre Altesse »

 Puis se tournant vers Cédric, il marmonne :

     «Ca bouffe des haricots en boite et des sardines trois fois par semaine et ça veut de la politesse. Attend qu’on arrive en Afrique ! Tu vas voir comment j’vais lui régler son compte à ce morveux de cousin pauvre! »

 

     Raphaël s’éloigne et prend son temps.  Il fait du lèche-vitrines pendant un long moment mais ses pensées sont ailleurs. L’excitation du départ est submergée par des pensées de solitude.

   ‘Oui Raphaël, tu es seul à présent. Seul avec ces cousins gâtés qui n’hésiteront jamais à te faire trébucher, à te tabasser, à se jouer de toi, à ironiser et à se servir de toi comme d’un laquais, à mettre sur ton dos toutes les bêtises qu’ils commettront, à te vendre comme un esclave si nécessaire.  Qu’adviendra-t -il ? Le tonton sera t-il assez subtil pour s’en rendre compte ? Mais non, oublie le tonton, Raphaël. Tu es seul et tu devras te battre !’

   La perspective des persécutions auxquelles il doit s’attendre de la part de ses proches ne l’enchante guère mais l’aventure est la, au bout d’un voyage de douze heures. Alors, à quoi bon ressasser des pensées négatives ?

     Il sort une lettre de sa poche, la déplie et la relit pour la vingtième fois : 

    «Ne crois jamais, mon garçon, que ta vie est insignifiante. Dans le grand ordre des choses, elle a tout autant d’importance, sinon davantage, que celles des rois, des présidents ou des stars du cinéma.  Lorsque tu traverseras des périodes douloureuses, garde ceci en mémoire. Ignore le passé, décroche-toi du futur et reste présent car c’est là qu’est  la vie, dans l’instant présent.

    Vis ta vie en jouissant des choses et des gens mais ne t’attaches à aucun. Vis tes rêves mais ne t’y attaches pas et ne t’identifies à aucune de tes pensées de regret ou de désir. Car c’est en s’identifiant à elles que l’homme a perdu ses ailes d’ange.

   Chaque fois que tu t’accrocheras à une pensée ou une émotion, tu monteras dans le train qui mène vers l’enfer. Chaque fois que tu laisseras les pensées se dissiper ou les émotions s’évader, tu planteras des racines au Paradis.

  

   Bon courage et bon voyage Raphaël. 

  Monique Cafalgua»

 

 

                                                         *

 

 

 

    Une demi-heure plus tard, ils sont tous les quatre assis sur les sièges du hall de départ. Non loin d’eux, des voyageurs Africains papotent. Le crane rasé, ils portent des pantalons treillis de type mercenaires du Sierra Leone et exhibent leur viande luisante comme l’ébène qu’ils ont pompé, pendant quatre heure chaque jour, dans les salles de gym des banlieues Est. Raphaël se demande s’ils s’en vont revoir la famille au Bandundu ou collecter un lot de cocaïne ou un paquet de diamants commandités par la mafia marseillaise.

   Assis épaule contre épaule, deux anglais costumes de gris et cravate rayée de rouge écarlate observent l’écran de leur ordinateur respectif planté sur leurs genoux. Leurs visages reflètent les soucis et le stress de la compétitivité des affaires.

   Deux Chinois jouent avec leurs portables. Un gros Afrikaner braille dans sa langue natale et lance des injonctions qui font rebondir son énorme panse. Il lâche un pet qui siffle comme un bec de bouilloire et va étouffer ses voisins. Prudemment, les gens se lèvent l’un après l’autre et s’éloignent pour chercher un air moins vicié.

 

   Un comptoir d’Air France est pris d’assaut par une ribambelle d’étrangers qui ont raté leurs correspondances grâce à l’inefficacité chronique du service d’immigration. Cinq Italiens mal rasés engueulent une hôtesse de tous leurs poumons nicotiniques. Ils viennent de passer trois mois sur une plate-forme pétrolière au Gabon et leur patience est à la limite de la décence. Pour eux, chaque heure dans la civilisation compte triple, d’autant que la mama et les bambinos les attendent dans le Piémont.

   Une jolie fille affalée dans un siège lit son magazine pour vieille adolescente en opinant de la tête au rythme infernal du rappeur qui lui déchire les tympans dans son MP3. Gonzague fait des efforts démesurés pour attirer son attention. Mais le rappeur gueule plus fort et entraîne la belle au royaume de l’illusion.

   On trouve des lambeaux d’humanité dans ce hall de départ : des gens aux yeux cernés qui viennent du bout du monde, n’ont pas dormi de la nuit dans une bétaillère de luxe, en survolant le globe à dix mille mètres  d’altitude et qui vont chercher on ne sait quoi de l’autre coté de la planète. On y trouve des mal rasés en jeans sales portant Tongs de hippies et lunettes en demi-lune et monture rouge.

 

  « Qu’est-ce que tu feras avec tes millions, Cédric ? Demande son frère évasivement.

 -J’achèterais une école de tennis, avec au moins deux terrains couverts. Et toi ?

 -Moi aussi ! J’ai pensé à la même chose. Le tennis, c’est ma vie. Et puis, avoir sa propre école, c’est mega cool pour tomber les filles. C’est trop d’la balle !

 -Et toi, Olivier, qu’est-ce que tu feras avec tes millions ?

 -J’donnerais la moitié à ma mère. Puis j’achèterais une Porsche…

 -Et toi, junior ? »

   Raphaël ignore la question  et regarde les gens qui déambulent.

   «Et toi… Raphaël ?

 -Il faut pas vendre la peau d’l’ours avant de l’avoir tué ! Répond-t-il, évasif.

 -Pardon Monsieur l’intello ?!

 -Qu’est-ce que j’en sais s’il y aura des millions ! S’exclame Raphaël. J’y pense même pas.

 -Jun…Raphaël,  on va t’apprendre quelque chose, proclame Gonzague. Dans la vie, il faut avoir des rêves. Il faut faire des plans. Si les millions te tombent sur la tronche et que t’y as pas réfléchi,  ça devient tout un gaspillage. Tu vas jeter ça aux pourceaux..  On voit que t’as pas l’sens des affaires. Tu perdras sans doute ta part du butin avec le premier courant d’air.

 -Comment tu sais ça, toi ?

 -Ça s’voit sur ta tronche que t’es pas bon pour les affaires. T’es trop mousseline et massepain.  Tu carbures à l’eau d’rose. Tu resteras dans la misère toute ta vie.

 -Casse-toi, t’es lourd !

 -Moi, j’veux être riche, proclame Gonzague.  J’veux sortir de mon milieu. Ma famille est minable. Je suis fait pour briller.

 -Tu vas arrêter tes études alors ? Demande Olivier.

 -Ma mère insiste pour que je prépare l’ENA. Mais pour moi, ce que compte c’est ramasser des millions et profiter d’la vie.

 -Et toi Raphaël qu’est-ce que tu veux faire de ta vie ? demande Olivier »

 L’adolescent fixe les dalles du parterre, pensif.

 « J’aimerais vivre, jouer, voyager et apprendre, répond-il d’un trait»

  Gonzague siffle avec une ironie saumâtre.

 « Tiens, prend un Kleenex ! Mouche-toi fort pour qu’on voie ce que t’as dans l’cerveau…

  -Tu ne veux pas être riche, toi qui vis dans la pauvreté ? Demande Olivier.

  -Je n’pense pas à ça ! Pour moi, c’est préférable d’expérimenter la vie que de compter ses sous ou que de vivre dans le futur avec des ambitions stupides.

 -On est donc d’accord, dit Gonzague. T’as pas d’ambition !

 -Si être riche est votre ambition, vous risquez de vivre l’expérience de vouloir plutôt que celle d’être.

- … ?

 -Tu peux redire ça en Français, junior ? Demande Cédric.

 -Tu déconnes, dit Gonzague. Ça veut dire quoi ton charabia ?

 -Rien !

 -Alors tu plaisantais ?

 -C’est ça ! C’était pour rigoler.

 -Sacré Junior ! Tu veux nous faire rire et tu sais pas par où commencer.  On va t’acheter le guide du petit comique»

 

   Raphaël hausse les épaules, se lève et va lécher les vitrines du Duty Free.

«  C’est pauvre comme toute la Somalie et ça se croit malin ! Ricane Gonzague.

 -Les Somaliens restent pauvres parce  qu’ils ne sont pas malins, conclut son frère.

 -Cette fois c’est toi qu’es fin nul, Cédric! »

 

 La voix suave de l’hôtesse dans les haut-parleurs invite les passagers à embarquer.

   « Les voyageurs à destination de Johannesburg….. »